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Slalom du Luc : de petites mains sur un volant brûlant.

Trois jours avant le 12ème Slalom du Luc, mes doutes et mes craintes s'estompent : je suis engagée en groupe loisir avec le mulet de Thierry. Malgré mon manque de confiance arrachant, je suis prête à franchir la ligne de départ et voir ce feu tricolore faire battre mon cœur à 100 à l'heure. Je roule dans la petite 106 XSi rouge depuis mercredi et me remue les fesses chaque soir à 22h pour faire mes marques sur le bitume entre Bras et Barjols. Le son de l'auto chante dans la nuit alors que mes premiers pas sont difficiles et incertains. Tant pis, ça y est : c'est parti !

13h30, samedi 20 aout : une journée d'entrainement circuit commence. Des équipes structurées ont investi le parking du circuit. J'arrive doucement au milieu des troupes occupées à vérifier la mécanique. Le pot d'échappement Rému me trahit... dans cette petite 106 modeste. Certains doivent se demander ce que je fous là, toute seule ! Des questions, j'en ai des milliers. Quand... euh, comment... ? 14h, le portail du circuit s'ouvre : j'enfile le casque et ça y est, je suis lancée hors des stands. Déjà ça, c'est "énorme". "Vous êtes seule ?" me demande un commissaire. "On ne laisse pas une fille seule." Et pourquoi pas ? Après deux sessions de 5-6 tours, Thierry arrive au circuit. Et suivra Bou, mon fidèle moniteur de pilotage et ancien colocataire ! Une série de conseils fusent... Gaz, ça passe à fond, tu braques trop, n'aie pas peur ! Et des autos fusent aussi à mes troupes ! On se prend vite au jeu malgré un jouet minuscule entre les mains d'une néophyte. Je double, je tiens difficilement la distance... mais je m'enflamme, c'est trop bon. Garde les pieds sur terre, Chérie, car tu vas te faire mal à la redescente ! La course, c'est demain ! Et tu le sais, le sprint n'est pas ton fort !

Le lendemain, levée à 5h45, j'emmène la 106 à travers le village alors que le soleil est à peine levé. Avec mes numéros collés sur la voiture, je file droit vers le circuit du Luc pour effectuer mon premier Slalom automobile. Je pose ma couverture en guise de bâche, ma caisse à outils et branche mon ventilo en direct, comme une grande. Dès 8h, je fais mon 1er essai chronométré. Je découvre les chicanes et je tâche de mettre en pratique les conseils avisés de Bou. Pour un premier passage, ce n'est pas trop mal. Je suis 2ème des sept filles (quelques monoplaces ont eu des ennuis). Et parmi la gente masculine dans des voitures similaires, je ne suis pas larguée. A 10h30, la première manche de course sera similaire. J'améliore légèrement... mais mes accélérations sont encore hésitantes et saccadées. "Je veux voir que tu es sûre de toi quand tu entres dans le virage" disait Bou, hier. Mais c'est difficile de prendre le rythme en un seul tour. "Tu as de la marge, il faut que tu mettes les gaz" me dit l’assistance d'un pilote de monoplace. Bon, Ok, je vais essayer.


3 heures plus tard, il fait plus de 35° dans l'air et la piste avoisine les 60°. Des amis m'ont rejoint sous cette chaleur écrasante. Dans une ambiance de plus en plus "décontracte", les "tu devrais faire ceci" et "tu devrais faire cela" fusent dans tous les sens. Je me déconcentre, je le sais... je le crains... je m'assoie déjà sur mes premiers passages comme si j'avais réussi quelque-chose. Mais quoi ?? Rien. Au départ de la 2ème manche, mon cœur bat plus vite qu'avant, alors que je suis moins timide. Et mes erreurs habituelles refont surface. Mon départ est réussi (merci Thierry !), mais les chicanes ne passent pas en 3ème (et non !), j'arrache une quille... et je perds mes moyens. Je suis en vrac dans chaque virage. Je tire la deux jusqu'au rupteur qui coupe net... et là encore, je perds du temps. Je n'améliore pas mon temps et accuse le coup de deux secondes de pénalités. D'un autre côté, l'équipage en double monte sur la 106 XSi 1.6 de la classe supérieure me passe devant de 2 secondes. Et là, je comprends une chose : la compétition m'a gagnée au plus profond de moi. J'ai les nerfs.

Pleine de résolutions pour la dernière manche, mes amis ne comprennent pas ma réaction d'enfant gâtée. C'est vrai, je suis déçue de mes performances face à celles des autres, débutants aussi. Tout le monde s'améliore, moi je stagne. En roulant plus propre lors de la dernière manche, mes supporters trouvent que je suis allée plus vite mais je ramasse deux secondes supplémentaires. La lecture de cette déception me laisse seule devant le tableau d'affichage. La course est finie, je ne peux plus faire mes preuves. Je m'allonge sur ma couverture et je rumine. Plusieurs pilotes masculins viennent me voir et me rabâchent qu'il ne faut pas abandonner. Leurs histoires sont touchantes, malgré des débuts difficiles. Les concurrents de mon groupe m'avoueront même qu’étant la seule à rouler avec des pneus de tourisme, ma performance est déjà belle sous une telle chaleur. Les pneus sont-ils la raison pour laquelle je n'ai pas réussi à améliorer mes temps au fil de cette chaude journée ? No one knows...

C'est une sensation unique d'être derrière un volant, devant une cellule délimitant une ligne de départ... Et c'est enrageant d'être celle qui commande les pédales alors qu'on est généralement celle qui conseille. Suivre des conseils n'est pas chose simple. Le sport automobile n'est pas un sport de brutes, c'est un sport tout en finesse.

12ème Salom du Luc les 20 et 21 août 2011.
Réjane Le Gratiet - 106 XSi 1.4 en groupe L1

"Réjane, c'est un prénom féminin ou masculin ?" me demande l'organisateur de la course par email. "Féminin ! Une de plus !"

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