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Un rallye du Mistral fini... c'est un cadeau qui n'a pas de prix !

Equipage : Alexandre Happe / Réjane Le Gratiet - 106 XSi A5

Il est 14h. Dans le froid du Pays d'Aix (mais sous un beau soleil), notre équipage quitte le parc fermé de Bouc-Bel-Air pour entamer ce Rallye midi-minuit. Sur la liaison, Alex découvre la boîte de vitesses. "Putain, elle tire long la boîte ! Ecoute ça ! On dirait que l'on part en promenade !" ricane-t-il. L'objectif de ce troisième rallye : franchir la "ligne d'arrivée" finale du parc fermé et s'amuser... "et ne pas finir dernier de la classe", rumine Alex tout bas. Il y a 8 partants dans notre classe A5 et notre petite auto fera de son mieux.

Sanglés, prêts à attaquer, j'ai à peine le temps d'attraper mon stylo et de lancer le chrono que les 5 doigts du commissaire ne forment qu'un poing ! Go... et la saucisse broute ! C'est un départ peu flatteur ! "GAF et 200 mètres, DAF !" j'annonce à Alex qui me regarde avec une lueur de sarcasmes dans ses yeux ! "Ben ouais, on y va, je suis à fond..." sourit-il avec ironie. La boîte nous désavantage sérieusement et ces allonges n'en finissent pas. "50m Gauche 3+ sur... putain non ! Droite 3+ sur GAF" suis-je surprise, en sortant fort de cette bosse qui déleste, quand j'aperçois un virage à droite. Nous avons noté un gauche alors que l'on plonge dans un droite ! "Mais c'est pas grave, rigole Alex. Je le vois que ça tourne à droite !". Départ de Coudoux : trois virages plus loin, la 106 lève deux pattes... c'est très glissant. Puis nous sommes dans cette ligne droite où il faut avoir le coeur de ne pas lâcher ! "Et 500 mètres à fond pour au repère Gauche 4... non c'est un droite, Putain ! Droite 4- sur au ciel DAF ! Tu vois, on s'est encore trompé !" je ne peux m'empêcher de râler à haute voix dans le micro. C'est impardonnable ! Deux erreurs qui sont passées inaperçues lors des reconnaissances. Je m'en veux, je nous en veux. Nous réalisons le 2ème temps de la classe en 2'43"0.

Passons en mode nuit ! Les petites spéciales de 4km restent identiques mais nous les abordons dans le noir. Lors du regroupement, j'ai pris soin de corriger nos erreurs de notes sur celles de Peggy. Il est hors de question de partir tourmentés, en doutant de la véracité des sigles inscrits sur mon cahier. Alors que la nuit tombe vite sur la ville de Rognes, les pilotes se rassurent mutuellement : "On perd en moyenne 10 secondes sur une spéciale de 4km dans la nuit !". C'est une manière de se préparer à lire un temps "décevant" à l'arrivée. Les harnais serrés au maximum, Alex et moi nous motivons l'un l'autre. En spéciales de nuit, les virages défilent sous vos yeux, sous vos roues, sans que vous ne les voyiez arriver. Lorsque la rampe de phare s'allume, le pilote, son copilote et l'auto ne font plus qu'un. Cette fois, Alex roule vraiment aux notes, ces notes que je lui annonce avec enthousiasme. Je ne suis plus ce « mannequin en polystyrène » commandé électroniquement pour aller pointer ! Dans ce gauche sur une bosse qui nous cache la suite, Alex et la petite 106 n'ont pas lâché. On passe la cellule de chronométrage et je crie par la fenêtre, comme d'habitude, "Est-ce que je peux avoir le temps des autres devant nous s'il vous plait ?" et une jeune fille s'approche avec une feuille de temps qu'Alex me dicte à toute vitesse puis il démarre en trombes, comme énervé. "Putain, on s'est fait rentrer !" me lance-t-il excité comme une puce. "Non, ok ? On ne s'est pas fait rentrer", je lui réponds sur un ton sec. "On fait le 2ème temps de la classe, ok ? Alors, tu arrêtes !". Putain, il m'a tout juste laissé le temps de calculer notre position dans la classe. Il me sourit, comme d’habitude, et j'ai envie de lui taper sur la tête ! Nous n'avons perdu que 2 secondes par rapport à notre passage en plein jour et l’on s’est fait plaisir !

Dans Coudoux, la saucisse glisse dans les enfilades. "Un virage raté, c'est un second virage en vrac". Cette notion à laquelle j'adhère me pousse à lâcher ces quelques mots à Alex : "Allez, on se calme !". Mal interprété par mon pilote, ce dernier pense que j’ai peur lorsque le petit bolide glisse. Peur de quoi ? Peur de taper un muret et perdre de précieuses secondes bêtement, ah ça, oui ! Sinon, laissez-la glisser la petite si elle aime ça ! Mais après réflexion, Thierry a raison, j'ai utilisé les mauvais mots : "On reste propre !" aurait été plus clair. Leçon à retenir : la communication est importante entre le couple que représente un pilote et son copilote. Malgré un freinage dans une distance généreuse, nous réalisons le 2ème temps de la classe et le 47ème temps au général ! Nous sommes joyeux comme si le Whisky Coca avait été consommé sans modération (n’est-ce pas Alex ?) ! C'est un fait : j'adore la nuit. Mais cet excès de joie ne doit pas se transformer en excès de confiance !

Il est minuit à la table de pointage de la dernière boucle. "Joyeux anniversaire, me lance Peggy. Tu croyais que j'avais oublié, hein ?". L'équipage 138 sont deux assoiffés de champagne ! Le pacte : trinquer à mon anniversaire et la fin du Rallye aux environs d'1h du matin. Avec Fred et Peggy, nous entretonons toujours le suspens à quelques secondes d'écart... c'est une petite bagarre sympathique ! A l'assistance, toute l'équipe nous accueille toujours avec le sourire, de l'entrain et la bonne humeur ! La voix de Michel ne peut vous laisser indifférent. Merci à Mickaël, sa femme et Laura & Guillaume ! Cela fait du bien de se retrouver à l'assistance avec des personnes dévouées. Fabien, mon caméraman en herbe, nous rejoint dans le camping-car, bien au chaud. Il sait qu'il va se geler les mains en attendant notre passage dans la Cride.


Un rallye n'est jamais gagné tant que l'on n'est pas rentré au Parc Fermé. Que de vérité. Dans la Cride, nous avons frôlé la sortie de route. Le muret est passé sous le bout du museau de la 106... et ça repart. J'essaie maladroitement de prévenir Alex des autres dangers de cette spéciale, mais je le retiens plus qu'autre chose. Alex perd confiance dans ses notes alors qu'elles sont justes. Ce passage commence à nus faire perdre notre deuxième place dans la classe. En liaison, cette déception nous rend nerveux. Malgré quelques phrases de réconfort et de motivation, l'ambiance dans l'habitacle a changé. Au départ de Lançon, je comprends que le moral compte beaucoup pour gagner un rallye. La 106 décolle et je suis sérieuse parce que je ne veux pas que l'on commette d'erreurs stupides. "100 mètres, Droite 3+ sur Gauche 2+ sur arrivée... Oh Putain Attention ! Attention !" je lance dans le micro en voyant des spectateurs s'agiter au bord de la route. Et lorsque le gauche se dérobe sous nos yeux, je vois la 205 de Fred & Peggy dans le fossé. Alex stoppe la voiture. Il sort en vitesse sans même décrocher le fil de la radio et court vers nos amis tombés quelques mètres après la cellule de chronométrage. Je le suis. Peggy est restée dans l'auto, elle me paraît choquée. Avec l'aide de plusieurs spectateurs, nous soulevons avec peine l'avant puis l'arrière de la petite Peugeot qui repart dans la nuit noire en espérant ne pas pointer en retard. La 205 n'a subi aucun dommage... elle est miraculeusement intacte et pourra finir son rallye, c'est ça qui est beau. Alex et moi avons retrouvé cette petite complicité, celle qui se crée lors des moments forts.

C'est le dernier passage dans la Cride. Alex m'a promis de calmer ses ardeurs dans l'épingle. J'annonce assez tôt pour prévenir plutôt que guérir "50 mètres, gauche 3- sur Attention épingle droite première !". Et Alex arrive comme une balle ! Et la vitesse ne passe pas, les roues se bloquent et l'on file droit sur quelques mètres. Finalement, tirer le manche n'aurait pas été si mal ! On tourne mais ça ne passe pas. "Allez, on y va, on repart, c'est bon, on y va, allez !" c'est un moyen, peut être un peu trop autoritaire, de re-motiver mon pilote.

Entrée en parc fermé d'arrivée. Je suis joyeuse comme si j'avais eu le plus beau cadeau du monde. Ce rallye est fini, c'est mon premier rallye fini. Alors que je commençais à ne plus y croire, alors que je m'étais presque posé un ultimatum : je me tiens à côté du camping-car, un verre de rosé à la main servi par Michel en attendant le chamapgne... et je susi heureuse. Je n'ai plus besoin de l'approbation de personne, ce rallye que tout le monde a critiqué est le mien. Fabien et Thierry nous rejoignent et l'on boit le champagne sur le parking dans le froid. Je m'en veux de ne pas avoir touvé Peggy et Frec pour partager ce moment avec eux.

Merci à tous, à l'assistance, à mon caméraman Fabien, à mon autre pilote Thierry Avalle auquel je souhaite Bonne Chance pour le Var, à Peggy et Fred pour leur gentillesse et leurs sourires... et à Alex parce que je suis heureuse de le copiloter. C'était un rallye merveilleux, très instructif... et surtout le cadeau d'anniversaire le plus sincère depuis deux ans.



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